Il y a deux manieres de passionner la foule au theatre : par le grand et par le vrai. Le grand prend les masses, le vrai saisit l'individu. Le but du poete dramatique, quel que soit d'ailleurs l'ensemble de ses idees sur l'art, doit donc toujours etre, avant tout, de chercher le grand, comme Corneille, ou le vrai, comme Moliere ; ou, mieux encore, et c'est ici le plus haut sommet ou puisse monter le genie, d'atteindre tout a la fois le grand et le vrai, le grand dans le vrai, le vrai dans le grand, comme Shakspeare. Car, remarquons-le en passant, il a ete donne a Shakspeare, et c'est ce qui fait la souverainete de son genie, de concilier, d'unir, d'amalgamer sans cesse dans son oeuvre ces deux qualites, la verite et la grandeur, qualites presque opposees, ou tout au moins tellement distinctes, que le defaut de chacune d'elles constitue le contraire de l'autre. L'ecueil du vrai, c'est le petit, l'ecueil du grand, c'est le faux. Dans tous les ouvrages de Shakspeare, il y a du grand qui est vrai, et du vrai qui est grand. Au centre de toutes ses creations, on retrouve le point d'intersection de la grandeur et de la verite ; et la ou les choses grandes et les choses vraies se croisent, l'art est complet.
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